Sandra et Maria Victoria, de la boutique Piscolabis
Un autre regard sur l'entrepreneuriat artistique
Maria Victoria et Sandra ont relevé le défi de créer une boutique de cadeaux spécialisée dans la vente de pièces artisanales de haute valeur artistique qui mettent en valeur la beauté des objets réutilisés. Leur objectif principal est de créer des objets beaux et fonctionnels avec des matériaux recyclés. Plus d’une décennie plus tard, elles nous racontent comment s’est déroulé le processus pour réaliser ce rêve.

Se promener dans les rues de La Havane, en particulier celles de son centre historique, pour profiter de son histoire à travers l'architecture est une expérience presque obligatoire pour ceux qui visitent le pays. À quelques pas de l'emblématique place de la Cathédrale, vous trouverez Piscolabis, une petite boutique de cadeaux qui promet aussi une promenade à travers l'histoire, autrement.
Une idée née de l'amitié

Sandra de Huelbes est créatrice de profession, spécialisée dans la haute couture, elle est reconnue dans le monde de la mode à Cuba. Mais elle a toujours eu des préoccupations qui dépassent ce domaine. De son côté, María Victoria Benito, Vicky pour ses amis, est architecte. Elle s'est davantage orientée vers le design d'intérieur. Leur relation avec le monde de l’art a été décisive pour relever ce challenge.
Grandes amies, elles partageaient un rêve commun : créer à La Havane un espace pour montrer leur talent, leur créativité et où elles pourraient commercialiser le travail de créateurs, artisans ou designers cubains de haut niveau. Jusqu’à la première décennie des années 2000, ce type de lieux n’était pas courant à Cuba. Les amitiés que chacune avait cultivées leur ont permis de fédérer un groupe d'artistes et d'artisans associés à leur projet. Désormais, plus qu’une équipe, ils forment ensemble une grande famille.
Pourquoi Piscolabis ?
Le mot évoque ces délicieux plats qui sont proposés comme collation lors de réunions ou de rassemblements. En écoutant les commentaires de leurs amis : “nous nous rendons compte qu'au fond, le magasin est cela, un petit espace conçu avec soin, où l'on peut trouver des choses qui ravissent les yeux et qui sont offertes avec amour comme souvenirs aux visiteurs”.
Cependant, Sandra n'hésite pas à préciser que s'il est vrai que certains de ses produits peuvent être considérés comme des souvenirs, ce n'est pas l'intention du lieu.

Ce n'est pas un magasin de souvenirs, c'est un magasin de cadeaux et de décoration d'intérieur avec divers objets. Ici on trouve des éléments de décoration, des luminaires, de la céramique, du travail sur bois ou de la papeterie, des armoires, des accessoires, parmi bien d'autres objets.
Durer à Cuba
Pour Sandra et Vicky, l'autorisation de création de petites entreprises privées a été le début de cette aventure, dont le but principal est de montrer ce qu'est Cuba.
Nous pensons que l’objectif du magasin est de montrer au monde ce qu'est Cuba, que notre pays est plus que du rhum ou des cigares, plus que ses danses et ses superbes filles.
Sandra et Vicky parlent aussi des difficultés qu'elles ont traversées, et toutes deux estiment que le plus complexe a été de s'approvisionner. “Il arrive parfois que le matériel nécessaire au développement d’une idée ne soit pas disponible”, nous raconte Sandra. La migration des créateurs les a également affectés dans le processus de production. “On ne peut pas sortir de notre objectif qui est d'être en permanence à la recherche d’alternatives fondées sur la durabilité, le respect de la planète et le recyclage”.
La créativité est un processus spontané
Le processus de création est très varié, tout comme les artistes et créateurs impliqués, c'est pourquoi Sandra et Vicky ne suivent pas de ligne préétablie. La polyvalence de leurs propositions leur permet de travailler sur plusieurs thématiques en même temps. Le magasin est assemblé, articulé, puis il s’organise ensuite autour des créations. La marque de fabrique du lieu est la création d'objets fonctionnels qu'on aimerait avoir chez soi et qui racontent une histoire. Le processus de création commence par une enquête sur les matériaux et leur origine. Pour Sandra, cet aspect est très intéressant et lui a permis d'orienter la vision de l'entreprise vers une proposition respectueuse de l'environnement.
L’idée était de créer à partir des ressources dont nous disposions. Tout ce qui est vendu dans le magasin sont des produits fabriqués à Cuba avec des matières premières nationales, avec les ressources dont nous disposons, des matériaux recyclés, des matériaux alternatifs et des objets récupérés. Bien qu'actuellement nous présentons d'autres types de productions, ces principes sont maintenus.
La conversation est agréable, les paroles de deux entrepreneuses reflètent des traces de nostalgie pour ceux qui ne sont plus là, mais aussi de gratitude pour les enseignements et les précieuses contributions. À leurs yeux, l'éclat que laisse la fierté de ce qui est fait, la satisfaction des objectifs atteints et l'enthousiasme des projets futurs, reste intact.
Tous ceux qui ont accompagné le projet y ont laissé leurs empreintes, mais ils restent anonymes. Cependant un nom apparaît : Eusebio Leal Spengler (1942-2020), qui fut de son vivant l'historien de la ville, celui qui aura rénové La Havane. Il s’est identifié au projet dès ses débuts et a amplement contribué à promouvoir sa création. La gratitude de Sandra et Vicky pour Eusebio restera éternelle.
Cubanía
Cubanía s’efforce de retranscrire, que ce soit par l’image, le son, ou l’écrit, la vie quotidienne de La Havane et de Cuba à un public hétéroclite, curieux, intéressé, souvent non résidents. Toujours en dehors des grands débats politiques, économiques ou des thèmes couramment traités par les médias officiels, Cubanía souhaite au contraire faire témoigner les Cubains de tous les jours, la société dans son organisation actuelle, à travers des lieux, des traditions, des expressions culturelles parfois méconnues.
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