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« La Bienvenue de Yemaya » : illustration de Raúl Valdés

L'été à Cuba vu par le dessinateur cubain Raupa

Auteur:
Allison Le Corre - EMP
Date de publication:
1 juillet 2020

Le graphiste Raúl Valdés, plus connu sous son nom d’artiste Raupa, fait partie de la nouvelle génération d’illustrateurs cubains qui se sont imposés parmi les figures les plus importantes du panorama du design cubain. Son travail est familier au quotidien du Havanais : ayant préparé les campagnes de festivals et d'événements importants pour la capitale, ses images envahissent les médias et rues de la ville plusieurs fois par an.

Une illustration pour représenter les jours meilleurs à venir

Pour Cubanía, Raupa nous fait l’illustration de l’été en pleine période de COVID, un été qui s'annonce morose, sans touriste et en quarantaine. Les plages, l’endroit préféré des Cubains durant les saisons chaudes pour survivre aux fortes chaleurs, ont été interdites pendant une partie de l’été. L’illustration est une bonne excuse pour Raupa pour rêver à des lendemains plus heureux. Il dessine une époque où de nouveau Cuba ouvrira ses portes, offrira son hospitalité, et célébrera l’été, la plage et la mer comme elle sait si bien le faire. Il décide de représenter la « Bienvenue » à travers l’image des offrandes de l’Orisha de la mer, Yemayá

J’ai voulu mettre en scène Yemaya qui voyage, qui traverse la mer. Pour illustrer le moment ou les gens traverseront à nouveau l’océan pour venir à Cuba. Et nous serons là pour les accueillir.

L’été cubain pour Raupa se résume à l’image de Yemayá et de la mer. Ayant grandi dans la Vieille Havane à quelques pas du Malecón, il a toujours été entouré d’une ambiance maritime, imprégnée des croyances afro-cubaines et des offrandes, habituelles non seulement au bord de la mer mais aussi dans les rues de la Vieille Havane et vers la Cathédrale, où il passait la majorité de son temps. Raupa a donc toujours vécu avec l'énergie de Yemayá, il ajoute : « Et je vois toujours de nombreux Cubains chérir leurs dieux, leurs parler, leurs offrir des fleurs blanches… ».

Avec cette image Raupa tente de définir l’été cubain en allant au-delà des clichés, tout en s’en servant : culture afro-cubaine, plage, oui… mais en donnant un sens plus personnel à ces stéréotypes. « Pour moi, le concept de la cubanía est compliqué à confronter, sans tomber dans les clichés, dans les idées préconçues les plus désagréables… Même si je dis toujours à mes amis, mes étudiants, mes collègues que les stéréotypes doivent être analysés pour tirer d’eux le meilleur. Le métissage, les voitures américaines, le mojito sont toujours des choses qui nous accompagnent, bien qu’on tente de trouver d’autres façons de représenter Cuba. Le bon sens c’est de pouvoir contourner ces concepts, et de les utiliser en sa faveur ».

Raupa : un designer aux multiples facettes

Raupa est un dessinateur expérimenté ayant travaillé pour de nombreux projets et dans différents secteurs du design à Cuba. Après ses études de graphisme à l'ISDI - Institut Supérieur de Design - il y a 15 ans, il entame sa carrière tout d’abord en complétant son service social au musée des Beaux-Arts. Après deux ans de travail pour l’État, il se met à travailler en free-lance et explore le monde de design audiovisuel. Raupa a touché à toutes les disciplines du design, animé d’une envie d’apprendre et de toujours élargir ses horizons. « Je n’aime pas me limiter à un seul aspect du large spectre du travail de designer. Aujourd’hui je travaille sur toutes sortes de projets différents qui me plaisent,et j’essaie toujours de faire des choses différentes : illustrations, affiches, design pour les réseaux sociaux, vidéo-clips, animations… J’aime changer constamment d’activité, ça m’aide beaucoup à me rafraîchir les idées et à renouveler mon énergie ».

Les projets qui l’ont le plus marqué sont ceux pour lesquels il a travaillé le plus de temps : la Casa de las Américas et la Muestra Joven, un festival de cinéma de jeunes réalisateurs. Dessiner les campagnes des évènements de la Casa ainsi que de la Muestra prend du temps et demande un effort soutenu pendant plusieurs mois. Cependant le résultat est si satisfaisant que chaque fois que Raupa termine il a déjà envie d’attaquer l’édition de l’année suivante. C’est dans le cadre de ces projets que Raupa a pu diversifier son travail : « J’ai fait plein de choses que je ne pensais jamais faire : vidéos, publicités, animations, graffitis sur les murs, design de textile… J’aime penser qu’il me reste d’autres choses à faire : des séries courtes, des courts ou longs-métrages, etc. ». Bien que le designer soit toujours dépendant du travail à la demande et des exigences du client, il rêve de pouvoir continuer à expérimenter et aller plus loin sans se laisser enfermer dans ces contingences.

La Casa de las Américas« La Maison des Amériques », est une institution cubaine créée en avril 1959 par le nouveau gouvernement révolutionnaire comme centre de promotion de la culture caribéenne et latino-américaine ainsi que point de rencontre entre artistes et intellectuels de la région. Au cours des années la Casa a reçu de nombreux intellectuels importants d'Amérique Latine et acquis un prestige dans la région. Elle continue à recevoir constamment des invités et organiser des évènements et conférences inter-continentaux pour toutes sortes de manifestations artistiques et culturelles - littérature, théâtre, journalisme, arts plastiques, cinéma... Grâce à son prestige, l'institution jouit d'une certaine autonomie vis-à-vis de l'État cubain, lui permettant une marge d'action plus large que d'autres institutions culturelles de l'île.

Les dessinateurs cubains qu’il admire le plus sont surtout ses pairs, la génération de designer la plus active et la plus présente dans le panorama de design cubain – Nelson Ponce, Edel Rodríguez - surnommé Mola-, Carlos Peza - surnommé Zamopeza -, pour ne citer qu'eux. C’est avec Nelson Ponce et Mola mais également avec Michele Miyares et Giselle Mozón, que Raupa prépare tous les ans la campagne du Festival le plus important de la capitale : le Festival du Nouveau Cinéma Latino-Américain. Parmi les dessinateurs étrangers qui l’inspire il mentionne l’Allemand Lars Harmsen, créateur de Slanted Magazine, avec qui il partage un mélange d’admiration et d’amitié réciproques.

Les Recommandations de Raupa

Les recommandations de Raupa ? Comme on l’aura déjà sûrement compris, il est passionné par la mer et recommande donc aux visiteurs un passage obligé par la plage, surtout celles de Varadero et des Cayos. D’autres solutions pour se rafraîchir l’été sont aussi les rivières, comme le Nicho, et les randonnées dans l'Escambray pour respirer l'air frais des montagnes cubaines.

Bien sûr, il recommande de se perdre dans les rues de la Vieille Havane, là où il a grandi, comme il le faisait lui-même autrefois. Il reconnaît que la Vieille Havane a bien changé depuis son enfance, « elle est meilleure ! ». Il encourage un passage vers les nouveaux bars dans ce quartier qu’il aime bien, O’Reilly 303 et El del Frente. Dans ce quartier il recommande une visite à l’atelier de sérigraphie de Portocarrero dans La Havane de l'Est. Mais il souligne que « La Havane c’est bien plus que la Vieille Havane ». Il conseille donc de se balader dans le quartier du Vedado, de faire un tour à la Fábrica de Arte, ou de prendre un vélo pour explorer, sans limite, la ville.  


Cubanía

Cubanía s’efforce de retranscrire, que ce soit par l’image, le son, ou l’écrit, la vie quotidienne de La Havane et de Cuba à un public hétéroclite, curieux, intéressé, souvent non résidents. Toujours en dehors des grands débats politiques, économiques ou des thèmes couramment traités par les médias officiels, Cubanía souhaite au contraire faire témoigner les Cubains de tous les jours, la société dans son organisation actuelle, à travers des lieux, des traditions, des expressions culturelles parfois méconnues.

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